L’armée de l’air ukrainienne est dans une situation difficile. Elle n’a pas reçu un seul nouvel avion depuis la dissolution de l’Union soviétique il y a trente ans. Mais un récent renforcement des troupes russes dans la péninsule de Crimée met en évidence la possibilité distincte (mais heureusement pas inévitable) d’une intensification du conflit militaire avec le voisin plus puissant de l’Ukraine. Et lors des opérations de combat de 2014, bapteme de l’air les avions de guerre ukrainiens ont subi de lourdes pertes face aux missiles russes.
En mai 2020, Kiev a annoncé son intention de dépenser jusqu’à 7,5 milliards de dollars au cours des quinze prochaines années pour réinventer son armée de l’air en se procurant de trente-six à quarante-deux chasseurs à réaction multirôles avancés. La France serait optimiste et pense que son avion de combat Rafale de 4,5 générations est le bon choix, et qu’elle est prête à fournir le soutien financier nécessaire à sa réalisation.
Le président français Emmanuel Macron devrait promouvoir la vente de Rafale lors d’une visite prévue cet été. Kiev pourrait dépendre davantage du soutien français avec le départ prochain à la retraite de la chancelière allemande Angela Merkel.
La revitalisation de la force aérienne ukrainienne, qui est dépassée, est inévitablement un projet à long terme. Officiellement, le plan prévoit l’acquisition de six à douze avions de guerre entre 2023 et 2025 pour commencer à familiariser le personnel, suivie de trente autres avions acquis entre 2025 et 2030. Ces appareils remplaceraient les chasseurs MiG-29 Fulcrum à courte portée de l’Ukraine.
Par ailleurs, l’Ukraine prévoit également de dépenser 1,43 milliard de dollars pour de nouveaux avions de transport de taille moyenne qui entreront en service entre 2027 et 2035, 1,25 milliard de dollars pour la révision de ses avions d’entraînement L-39 Albatross et 1,79 milliard de dollars pour équiper quatre régiments de nouveaux systèmes de missiles sol-air de moyenne portée.
Le Rafale est un favori surprenant car il s’agit d’une option plus coûteuse que les chasseurs à réaction américains ou les jets suédois Gripen également envisagés. Mais Paris a bon espoir qu’une garantie pouvant atteindre 85 % d’un prêt accordé à Kiev pour payer l’achat d’un Rafale (pour lequel 1,5 milliard d’euros a déjà été mis de côté) scellera l’accord.
La France met également en avant un mécanisme commercial existant pour la vente d’avions à l’Ukraine, établi pour un marché de 551 millions d’euros portant sur 55 hélicoptères Airbus. Paris et Washington pourraient également proposer des chasseurs à des conditions généreuses dans le cadre d’un jeu plus long : empêcher la Chine d’acheter le fabricant ukrainien de moteurs Motor Sich.
Les entreprises chinoises ont eu des difficultés à produire des turbofan à haute performance pour leurs chasseurs à réaction. La technologie de Motor Sich pourrait contribuer à surmonter ce goulot d’étranglement technologique.
Le magnat chinois Wang Jing possède déjà une participation de 56 à 76 % dans Motor Sich, mais l’Ukraine a nationalisé l’entreprise en raison de la pression exercée par Washington. La rumeur d’un rachat de Motor Sich par le constructeur français de moteurs Safran pourrait mettre un terme définitif à cette possibilité.
En outre, une aide étrangère généreuse est une condition préalable à la modernisation de l’UAF, car le budget annuel du service n’est que de 300 millions de dollars par an, soit l’équivalent du prix d’achat de seulement trois Rafales. Avec ce budget, les pilotes de l’UAF ne peuvent voler qu’une poignée d’heures par an. Même une modernisation réussie de l’armée de l’air ukrainienne prendrait de nombreuses années avant d’aboutir à des avions de guerre utilisables par l’Ukraine.
Les critiques doutent que la rénovation de l’armée de l’air ukrainienne en vaille la peine en raison de son coût et de la capacité avérée de la Russie à infliger une usure aux avions pilotés.