Les avions de chasse russes dans le conflit ukrainien

Depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022, la Russie a progressivement adapté son aviation militaire pour surmonter les défis posés par la défense ukrainienne et l’assistance militaire occidentale. Face aux pertes subies et aux limites de ses stratégies initiales, l’armée de l’air russe a mis en place de nouvelles tactiques, modernisé certains appareils et renforcé son utilisation de munitions à longue portée.

L’un des principaux changements dans l’approche russe concerne l’utilisation plus prudente des avions de chasse et des bombardiers dans l’espace aérien ukrainien. Les défenses aériennes ukrainiennes, constituées de systèmes S-300, Buk-M1 et des batteries Patriot et NASAMS fournies par l’OTAN, ont infligé des pertes notables aux forces aériennes russes. En conséquence, la Russie a réduit ses missions en profondeur au-dessus des zones fortement défendues et privilégie les frappes à distance depuis son propre espace aérien ou depuis des zones sous son contrôle.

L’aviation russe a augmenté son recours aux missiles de croisière et aux bombes guidées pour frapper les infrastructures militaires et stratégiques ukrainiennes. Les bombardiers stratégiques Tu-95MS et Tu-160, opérant depuis la Russie, lancent des missiles Kh-101 et Kalibr sur des cibles situées à plusieurs centaines de kilomètres. Ces frappes visent à affaiblir les capacités logistiques et énergétiques de l’Ukraine, tout en réduisant l’exposition des avions russes aux tirs adverses.

L’intégration croissante des drones dans les opérations aériennes constitue un autre axe d’adaptation. La Russie utilise des drones de reconnaissance comme l’Orlan-10 et le Forpost-R pour collecter des informations sur les positions ukrainiennes et guider les frappes d’artillerie et aériennes. En parallèle, elle emploie massivement des drones kamikazes Shahed-136 d’origine iranienne pour saturer les défenses ukrainiennes et détruire des infrastructures essentielles. Cette stratégie permet de compenser en partie la difficulté d’opérer en toute sécurité dans un espace aérien contesté.

Les avions de chasse russes ont également bénéficié d’améliorations technologiques. Le Su-35S et le MiG-31 ont été dotés de nouveaux missiles air-air longue portée R-37M, capables d’engager des cibles à plus de 300 km. Cela permet à la Russie de menacer les appareils ukrainiens sans entrer dans la zone de couverture des systèmes anti-aériens occidentaux. Par ailleurs, certains MiG-31 ont été modifiés pour emporter des missiles hypersoniques Kinzhal, qui ont été utilisés contre des cibles stratégiques en Ukraine.

La formation et l’organisation des unités aériennes russes ont également évolué. Les pilotes sont formés à des techniques de guerre électronique pour contrer les missiles sol-air ukrainiens. L’usage de brouillage électronique s’est intensifié pour perturber les systèmes de guidage des missiles occidentaux. De plus, les missions de chasse sont souvent menées en coordination avec des avions AWACS A-50U, chargés de la surveillance et du guidage des opérations aériennes.

L’aviation russe doit aussi faire face à l’amélioration de l’armée de l’air ukrainienne. L’Ukraine a reçu des missiles occidentaux AIM-120 AMRAAM et HARM, adaptés sur ses MiG-29 et Su-27. L’arrivée future des F-16 promet de compliquer encore plus la tâche de l’aviation russe. Ces chasseurs occidentaux, couplés aux radars et systèmes de défense sol-air modernes, pourraient contraindre la Russie à revoir encore ses stratégies aériennes.

En résumé, la Russie a adapté son aviation au conflit ukrainien en misant sur l’usage accru des frappes à distance, des drones et de la guerre électronique. Elle continue de moderniser ses chasseurs et d’améliorer ses tactiques pour faire face à une défense aérienne ukrainienne toujours plus performante. L’évolution de la guerre aérienne en Ukraine repose désormais sur un équilibre entre modernisation des avions, intégration de nouvelles armes et capacité à s’adapter aux contre-mesures ennemies.